Le camp militaire de 1945 à nos jours...
(par Jean-Marie CHEKHAB)
Des visites du camp peuvent être organisées : Renseignements JM CHEKHAB (03.84.82.38.77)
Les recherches menées sur l’histoire du camp militaire de Foucherans, depuis maintenant plus de trois ans, permettent à ce jour de définir trois périodes bien distinctes : 1- du printemps 1943 au mois de septembre 1944, le camp construit par les Allemands (le camp de la Luftwaffe) dans le bois de Chevanny, est un centre de contrôle des opérations aériennes de la chasse de nuit allemande (II/NJG/4) pour l’Est de la France. Son travail consiste à intercepter tous les appareils alliés volants en direction de l’Allemagne, l’Italie du Nord ou la vallée du Rhône. La salle de contrôle située dans le bâtiment principal est le lieu où sont centralisées et analysées les informations provenant de diverses sources : stations radars (ex : Saint-Jean de Bœuf vers Dijon, Mont-Roland vers Dole), informations visuelles des pilotes, autres sources... C’est là aussi que sont prises les décisions de faire décoller les appareils de la chasse de nuit basés à Tavaux, Dijon ou d’ailleurs, pour l’interception des bombardiers alliés. Surveillé par la résistance, le camp de Foucherans et le terrain d’aviation de Tavaux sont signalés comme objectifs de bombardements par le 2ème Bureau en août 1944. Les Allemands s’enfuient du camp au début du mois de septembre.
2- de septembre 1944 au mois d’avril 1945, le camp est utilisé par le Génie de l’air américain (Engineer Air Force, ou EAF) qui doit remettre au plus vite en état le terrain de Tavaux endommagé par l’US Air Force et par les Allemands avant leur départ. Le camp sert d’hébergement, d’atelier de réparation des avions endommagés et d’entrepôt de matériel et de plaques métalliques pour les pistes. Les Américains construisent aussi un grand hangar métallique qui sera démonté après le conflit et donné à l’aéro-club de Tavaux où il s’y trouve toujours. |
3- d’avril 1945 au mois de mars 1946, le camp devient, après le départ des soldats américains, un Dépôt-école du Génie de l’Air (D.E.G.A). Appartenant au bataillon 71, il comprend un commandement, des services administratifs, une division d’instruction chargée de la formation militaire et technique du personnel destinés aux unités du Génie de l’Air., une section Atelier-entrepôt chargée de la réception, réparation et répartition du matériel technique ainsi qu’un garage. Au moment de sa plus forte activité, le camp compte près de 300 hommes, divisés en 3 compagnies ayant chacune un travail bien défini pour permettre et soutenir l’avance alliée vers le nord et l’Allemagne Nazie :
Le Dépôt-école du Génie de l’Air de Foucherans est dissous à la date du 1er mars 1946. Au total, le Génie de l’Air (Américain et Français) stationné à Foucherans dans l’ancien camp de la Luftwaffe a joué un rôle de soutien important aux appareils alliés (P-47, B26, B25, …), basés à Tavaux et à Dijon. Grâce à de puissants moyens de terrassement et de transport de matériaux, les pistes sont ouvertes rapidement aux avions d’attaque au sol et aux bombardiers qui peuvent effectuer des missions dans les Vosges, en Alsace et en Allemagne jusqu’à la victoire finale. |
Aux origines du camp : le terrain d’aviation de Tavaux
L’aérodrome militaire de campagne de Gevry-Tavaux La première Guerre mondiale a montré le rôle que pouvait jouer l’aviation à condition de mettre sur pied une organisation efficace. C’est ainsi que dans les années 30, commence en Allemagne la préparation à la guerre. Dès 1936, les usines d’armement allemandes fabriquent des avions et les appareils qui sortent en série sont des Dornier 17, des Messerschmitt 109 ou des Stukas. En France, l’aviation militaire entame aussi une refonte de son organisation et recherche des terrains susceptibles de devenir des aérodromes militaires de campagne. En 1936, dans la région doloise, la reconnaissance s’effectue avec MM. Desgranges et Andrée Bouvier, qui seront respectivement président et membre de l’aéro-club. Finalement, une zone de 150 hectares est retenue entre les villages de Gevry et de Tavaux et deviendra l’aérodrome militaire de Gevry-Tavaux. En 1939, la guerre approche et sa préparation s’accélère avec de nombreux transferts d’escadrilles d’une base à une autre sur le territoire français.
La défaite (1940) Le 10 mai 1940, la guerre s’est rapprochée, c’est le début de la bataille de France, tous les terrains d’aviation du nord-est de la France sont bombardés et la région est dans le collimateur de la Luftwaffe. Dès le 15 juin 1940 au soir, les unités françaises de Tavaux reçoivent l’ordre de se replier pour des régions moins exposées du midi de la France et les matériels qui ne peuvent être évacués de Tavaux sont détruits sur place. Partie du sud-ouest de Langres le matin du dimanche 16 juin, la 2ème Panzer division progresse vers Dole dont les environs sont occupés dès l’après-midi par les colonnes allemandes. Leur arrivée est annoncée à l’avance par les avions de la Luftwaffe qui bombardent les lisières de Tavaux, Damparis et Dole, provoquant la panique parmi la population. Les colonnes blindées et motorisées occupent la ville le 17 juin au matin. Dole et ses communes de banlieue, dont Foucherans, sont dans l’isolement le plus complet.
Le terrain d’aviation de Tavaux aux mains de l’armée allemande (1941) Le 16 juin 1940 vers 10 heures, un bombardement de la Luftwaffe paralyse le trafic ferroviaire à Tavaux sur la ligne de Dole à Lons le Saunier. Plusieurs bombes tombent aussi sur le village de Tavaux faisant 11 morts parmi les habitants. Le bombardement du village visait les deux dépôts d’essence qui se trouvaient, l’un aux Caboulots, l’autre derrière l’église. En fin d’après-midi une avant-garde motorisée de la Wehrmacht arrive aux abords de Tavaux qui tombe aux mains des Allemands. Mais le départ des troupes françaises ne signifie pas pour autant l’abandon des terrains acquis par l’Etat. Au contraire, le terrain d’aviation de campagne deviendra opérationnel à part entière avec la construction par les Allemands d’une piste en béton qui s’allongera au fur et à mesure des exigences des nouveaux appareils de la Luftwaffe. C’est au début de l’année 1941, que la Luftwaffe, consciente de l’énorme potentiel de l’aérodrome idéalement situé et de ses possibilités d’extension, investis le terrain d’aviation afin de réaliser un aérodrome militaire permanent pour les différentes missions aériennes de ses troupes. Ils commencent à développer l’aérodrome en étendant sa superficie sur les terrains des communes de Gevry et Choisey et en construisant de très nombreuses structures : abris d’avions en U et pistes bétonnées. Sur la piste de l’ancien aérodrome, les allemands enlèvent les grilles de métal posées à même le sol qui permettaient l’atterrissage puis commencent à construire à la place une vraie piste en dur. Ils ont l’excellente idée de la faire dans le sens des vents dominants. L’ouvrage comprend une piste bétonnée d’environ 1500 m de long sur 80 m de large et une voie de dégagement entoure la piste pour relier celle-ci aux lieux de stationnement des appareils : hangars, alvéoles à ciel ouvert, hangar technique, butte de tir. Une douzaine de hangars sont construits dans le village de Gevry. |
L’aviation allemande à Tavaux : la Luftwaffe (1941 à 1944) et la Nachtjagd L'activité aérienne allemande est importante entre 1941 et août 1944 car le terrain d'aviation de Tavaux à simultanément plusieurs fonctions. C'est d’abord une base-école pour l'apprentissage du pilotage sur planeur avec l’entraînement des pilotes et des troupes aéroportées. On voit sur le terrain et dans le ciel des Heinkel 117 jumelés tirant des planeurs de type DF 234 à 10 places, des Gigant Me 323, des Gotha à 20 places (des GO 242), des Heinkel 111 Zwilling pentamoteurs (2 Heinkel couplés avec 5 moteurs) tracteur de planeurs, des Junker 52 et des Siebel transport de troupe. C’est aussi un terrain de dégagement utilisé comme un « port » par toutes les escadrilles de la chasse de jour qui survolent le Jura et qui peuvent atterrir à tout moment. Sur la base se trouve également un atelier de réparation et de maintenance pour tous les appareils. Puis à partir de 1943 ce sera la base des appareils de la chasse de nuit : la Nachtjagd, appartenant à la « ligne Kammhuber ». L’objectif de la Nachtjagd est d’intercepter les vagues de bombardiers alliés se dirigeant de nuit sur les sites sensibles de l’est de la France, d’Allemagne ou d’Italie du nord (industries d’armement et dépôts de munitions). Différents types d’appareils seront utilisés pour effectuer ce travail : principalement des Dornier 17 mais aussi des Dornier 217, des Junker 88 et des Messerchmitt 109. Ces appareils seront équipés, en 1943, de radars de bord et munis d’antennes en bout de nez.
Mais prévoyants et pour ne pas avoir à reconstruire les installations logistiques et les casernements à chaque bombardement et aussi pour permettre un repos réparateur aux équipages et personnels de la chasse de nuit, les Allemands décident dès 1942 de déplacer l’hébergement, les équipements de transmission et le centre de contrôle aérien de Tavaux dans un lieu moins exposé : le bois de Chevanny à Foucherans. Ce relatif éloignement du terrain d’aviation relève de deux impératifs : d’une part, la nécessité de garantir le repos et la quiétude des personnels intervenants de nuit, dépendants d’une logistique spécifique différente de la chasse de jour ; d’autre part, mettre à l’écart des attaques alliées les coûteuses installations électroniques et infrastructures de radiocommunication et téléphonie du centre de contrôle aérien. |
Le centre de contrôle aérien de la Luftwaffe à Foucherans (1943-1944)
Un chantier de plusieurs mois
Les premiers Allemands sont aperçus en repérage dans le bois de Chevanny à la fin de l’année 1942. C’est au printemps 1943 que les travaux de construction du camp commencent vraiment. Il a pour maître d'œuvre l'Organisation Todt.
De nombreuses entreprises allemandes et françaises vont travailler à la construction des différents bâtiments qui vont s'étendre sur près de 2 hectares dans plusieurs coupes du bois de Chevanny. Les terrains réquisitionnés pour construire le camp appartiennent à la commune de Foucherans. Une quinzaine d’édifices peut être dénombrée sur le site en septembre 1944.
La Luftwaffe dans le camp Le camp est prêt à accueillir des troupes à l’automne 1943. D’après le témoignage d’un employé ayant travaillé à la construction du camp comme maçon puis ensuite aux cuisines, le personnel allemand s’élève au minimum à 75 personnes, car lorsqu'il était aux cuisines on lui demandait souvent de préparer 75 beefsteaks. Ce chiffre ne changera pas jusqu'en septembre 1944. Il y a autant d'hommes que de femmes dont beaucoup de sous-officiers. Les femmes sont des auxiliaires féminines de l’armée de l’air surnommées « les souris grises » à cause de leurs uniformes gris-bleu. Elles arrivent pour la plupart de la base aérienne de Saint-Dié et appartiennent au service de guet aérien, le Flugmedeldienst (Fluko). Le bâtiment 4, le plus imposant, contient le centre de contrôle aérien composé d’une grande salle d’observation des opérations aériennes et de plusieurs salles techniques annexes. Cette pièce est coupée en deux, à l’époque, par un immense tableau vitré reproduisant une carte de l’Est de la France. D’un coté, se trouve l’emplacement des opératrices munies de lampes électriques à faisceaux très étroits ; de l’autre coté, se trouve l’emplacement des officiers et des contrôleurs. Des postes émetteurs-récepteurs, un central téléphonique, des radars, des téléscripteurs…, complètent l’organisation. Le groupe NJG (groupe de chasse de nuit) comprend plus d’une cinquantaine de personnes qui logent à proximité dans les baraquements, le tout camouflé soigneusement aux vues aériennes et terrestres par la végétation du bois de Chevanny. |
Sommairement, le système fonctionne de la manière suivante : un maillage de radars (Freya et Wasserman) disposés dans le nord et l’ouest de la France a pour mission d’assurer l’alerte lointaine en détectant à longue distance (300 km à 6000 mètres d’altitude) le flux des bombardiers de la Royal Air Force (RAF) et de l’USA Air Force. A 15 km à l’ouest de Dijon, à St-Jean-de-Bœuf, se trouve une grande station radar allemande, la station du Dackel. Cette détection est transmise par téléphone à des centres d’opérations (de zone à partir de 1943) afin de diffuser l’alerte et d’établir une situation aérienne locale et générale. Des stations, comme celle de Foucherans, réparties d’abord le long de la Norvège à Brest, puis en profondeur, à l’intérieur des pays occupés, ont pour mission de guider la chasse d’interception de jour et/ou de nuit. Un ou deux radars Freya permettent de localiser la vague de bombardiers afin de la situer en azimut, distance, altitude, force et deux Würzburg-Riese (radars de poursuite) assurent la fonction d’interception, l’un étant chargé de localiser l’ennemi, l’autre de guider les chasseurs. L’information qui arrive grâce au central téléphonique est ensuite transmise à une opératrice de la salle d’observation qui projette la position des appareils sur la carte du tableau vertical en verre au moyen d’une torche ayant un faisceau très étroit. Chaque point lumineux représente un avion et le déplacement des points sur la carte permet d’en suivre les évolutions. De l’autre coté du tableau, les contrôleurs qui suivent les activités aériennes, mettent en alerte au moment opportun des chasseurs basés sur le terrain de Tavaux, de Dijon ou d’ailleurs puisque tous les centres de contrôle sont reliés entre eux par téléphone ou téléscripteurs. Dès que l’interception est ordonnée, un contrôleur au sol guide l’appareil sur l’objectif à l’aide d’un radar de poursuite et de la radio. |
Les combats terrestres et aériens pour la libération de Foucherans et Tavaux
La Résistance locale et les renseignements Rien ne saurait remplacer l’exemplaire travail de renseignement des réseaux de la Résistance dans le Jura occupé. Travail obscur, accompli au prix de risques énormes, des réseaux entiers s’attachent à dépister et surveiller les sites électroniques allemands (station radar, centre d’écoute, centre de contrôle aérien…). Ils confirment les écoutes électroniques et transmettent des schémas de matériels, des photos, des plans d’ensemble en construction ou déjà en service. La résistance locale est au courant de la présence du camp de Foucherans qu’elle fait surveiller. Au début de l’année 1942, Charles Thomas est intégré au service de renseignements d’une unité de partisans F.F.I, plus connu sous le nom de Bataillon Dubois, sous les ordres du capitaine Dubois, de son vrai nom Paul Mouret. Charles Thomas, sous le pseudonyme de « Yves » et avec un ami de Foucherans, Charles Van Bever dit « trottinette », transmettent à Madame Mouret, à Navilly, des informations concernant le terrain d’aviation de Tavaux et ensuite, à partir de 1943 sur « l’important centre de transmission installé dans les bois de Foucherans ». Ces renseignements remontent ensuite aux services secrets de renseignement de l’armée de l’air alliée chargé de définir les objectifs de bombardements. C’est ainsi qu’un premier rapport (France-Air, Objectifs de bombardements, source SHAA) diffusé en juin 1944 et comprenant des informations datées d’avril et mai 1944 concerne les installations radioélectriques de Foucherans et l’aérodrome de Tavaux. Il signale plusieurs éléments d’importance qui justifieraient un bombardement :
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Dans ce même rapport, il est aussi signalé le matériel se trouvant au camp de Tavaux à cette période, à savoir :
Le nombre d’appareils présents sur le terrain à ce moment est aussi indiqué : Des informations sur le personnel précisent que : Ce rapport confirme bien l’importance qu’avait le centre de contrôle aérien de Foucherans dans la ligne de défense pour la protection du Reich contre les attaques des bombardiers alliés. Il confirme aussi que Foucherans n’allait pas tarder à devenir plus important c’est-à-dire un centre de zone de première catégorie dans la hiérarchie des stations de contrôle aérien, d’où l’urgence de bombarder Tavaux d’autant plus qu’un second rapport de la Direction Générale des Services Spéciaux à Alger, en date du 12 août 1944 (AZIS, source SHAA), signale que le nombre d’appareils se trouvant sur le terrain d’aviation de Tavaux est en croissance : Ces rapports vont être suivi d’effet puisque le 14 août 1944, deux jours après la réception de ce dernier rapport, le terrain de Tavaux va être sévèrement bombardé par une formation de B 24. Un matin, des bandelettes en aluminium, des « windows », sont larguées sur Foucherans pour brouiller les appareils électroniques du type radar et radio du camp de la Luftwaffe. |
La Résistance locale et les sabotages
Un autre groupe de résistants appartenant au bataillon Maurice Pagnon effectue de nombreuses actions de sabotage concernant Tavaux et Foucherans. Dès 1940, en décembre, un câble allemand est saboté à Tavaux. En 1943 les actions vont être rares mais c’est surtout en 1944, après l’annonce du débarquement en Normandie des troupes alliées que les actions vont être les plus nombreuses.(coupures de lignes téléphoniques, sabotages de la ligne EDF et PTT, déraillement de trains…).
Les attaques de l’aviation alliée : 1943-1944 Le meilleur moyen pour empêcher la base aérienne allemande de fonctionner est de bombarder les pistes du terrain d’aviation. C’est ce qui va être fait. Mais ces attaques sont nombreuses à partir de 1943 et il est difficile de toutes les répertorier. En Voici néanmoins quelques unes qui sont restées dans les mémoires. |
Le 14 août 1944, la veille du débarquement de Provence, vers 11 heures du matin, une très importante formation de bombardiers US de la 8ème Army Air Force passe au-dessus du terrain de d’aviation de Dijon-Longvic sans lâcher une bombe. Elle se dirige en fait vers le terrain d’aviation de Tavaux qu’elle survole puis se dirige sur Dole et revient sur le site pour larguer ses bombes. Le 467e Bombardement Group (lourd) est venu tout spécialement de « Rackheath » en Angleterre avec 83 bombardiers B 24 Liberator protégés par une dizaine de chasseur Mustang P51, qui larguent des centaines de bombes GP de 100 livres. Les avions allemands présents sur le terrain sont détruits au sol. L’arrosage épargne Gevry mais à Tavaux on déplore 5 victimes et de nombreuses maisons détruites. Après le bombardement, les appareils se dirigent sur Dijon pour larguer le restant de leurs projectiles en ordre dispersé sur l’ensemble de la base aérienne allemande avant de retourner en Angleterre. |
La fuite des Allemands et la destruction de leurs installations
L’avance alliée se précisant à partir du 26 août 1944 et avant de quitter définitivement la région doloise les Allemands décident de faire exploser leurs installations et tout ce qu’ils ne peuvent pas emporter pour protéger leur fuite et rendre le matériel inutilisable. A Tavaux, le 2 septembre, l’occupant prévient la population de se protéger et fait exploser des munitions sur le camp d’aviation. Ils sabotent aussi les installations et font sauter les pistes du terrain d’aviation de Tavaux à l’explosif. Une épaisse fumée noire est alors visible jusqu’à Dole. A Foucherans, ils détruisent à l’explosif les installations de la salle de contrôle des opérations aériennes pour rendre le matériel de radio-transmission inutilisable et mettent le feu à des baraquements dont l’un contient des munitions et des armes.
Ils décident aussi, pour protéger leurs arrières avant de s’enfuir, de faire sauter le tunnel ferroviaire de Champvans. Au même moment, un autre train chargé de munitions et venant du midi de la France, attend en gare de Foucherans que les troupes soient passées pour suivre le même chemin. Mais bloqué à cause de la destruction du train précédent il lui est impossible de faire mouvement. Les Allemands prennent alors la décision de le faire aussi sauter pour ne pas qu’il tombe aux mains des alliés.
Le génie de l’air américain à Foucherans et Tavaux (1944-1945)
La progression vers le nord et l’Allemagne des unités terrestres alliées est soutenue par les formations de l’armée de l’air alliée qui maîtrisent l’espace aérien, poursuivent et attaquent les troupes ennemies au sol, bombardent les voies de communication sur les arrières de la Werhmacht. Ces actions s’effectuent à partir d’aérodromes construits de toutes pièces ou récupérés à la Luftwaffe comme celui de Tavaux.
L’Engineer Air Force Battalion à Tavaux Pour remettre l’aérodrome de Tavaux en état, les unités américaines du génie de l’air (Engineers Air Force Battalions) rattachées à l’aviation utilisent d’énormes surfaces de tôles perforées sur la piste d’envol et les « Taxis ways ». Pour effectuer les terrassements, mettre en place des revêtements provisoires ou bitumineux ou en béton, elles disposent d’engins et véhicules (bulldozers, décapeuses, niveleuses, pelleteuses…) qu’elles répartissent en fonction des besoins, moyens que peu d’entreprises françaises de travaux publics disposent à l’époque. Dans le même temps, l’hébergement des troupes américaines permanentes ou de passage se fait chez l’habitant, à Tavaux, à l’école de Damparis, à la gare de marchandise de Saint-Aubin, à Dole (à Saint-Ylie, à l’hôtel de la cloche, à la caserne Bernard), à Foucherans et au camp de Foucherans… ou sous des tentes comme les camps de toiles qui seront installés à Tavaux-Cité. |
L’Engineer Air Force Battalion à Foucherans Les Américains du génie de l’air s’installent aussi à Foucherans, dans le camp pris à la Luftwaffe. Les nouveaux locataires américains se mettent rapidement au travail pour remettre en état le terrain d’aviation de Tavaux et remonter des appareils neufs avec des pièces provenant des appareils endommagés. L’hébergement des troupes se fait pour une part dans le camp mais aussi chez l’habitant et à l’usine Audemar. Les soldats apportent avec eux du chewing-gum, des boites de conserves, des cigarettes et d’autres produits encore inconnus des français comme la crème de cacahuète, crème à raser en tube et le rasoir à lames jetables. Les premiers éléments de la troupe US sont un peu des « têtes brûlées » et dans leurs camions GMC, certains soldats conduisent à toute allure dans les rues du village. Malheureusement un gamin de 7 ans et demi est renversé et tué sur le coup par un de ces camions.
Les combats de l’aviation alliée basée à Tavaux contre l’Allemagne Nazie Moins d’une semaine après la libération, les chasseurs-bombardiers de la force tactique franco-américaine n° 1 qui appuient les troupes au sol peuvent utiliser l’aérodrome de Tavaux. Les premiers occupants arrivent le 20 septembre, ce sont des P47 Thunderbolt. Il y en a plus d’une centaine appartenant à plusieurs unités. Puis viendront les bombardiers B26 Marauder et B25 C Mitcheell. Le nombre des unités de passage à Tavaux est élevé mais plus qu’une liste exhaustive des escadrilles, c’est le compte-rendu des missions effectuées jours après jours contre l’Allemagne Nazie qui paraît important à transmettre avec le 324th Fighter Group, le 371st Fighter Group et le 320st Bomb Group mais aussi les groupes de la chasse française : le GC I/5 Champagne, le I/3 Navarre et le II/3 Dauphine.
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La Base du Génie de l’air français au camp de Foucherans
Le Génie de l’air (1945-1946) A la fin de l’année 1944 et au début de 1945, le camp de Foucherans est occupé par les Américains, qui ne tarderont pas à partir, et un groupe d’une dizaine de soldats du génie de l’air français, le BGA 72 (des marocains) rejoint par une unité du génie de l’air français : le BGA 71 (Bataillon du génie de l’air). Cette unité est rattachée au génie US de la 9è compagnie. Après son départ en mars 1945, le camp devient une base du génie de l’air français avec la création d’un Dépôt-école : le DEGA, (Dépôt-Ecole du Génie de l’Air) qui fonctionne de mars 1945 à février 1946. Ce Dépôt-école est mis en place par l’aspirant Justin Legouit, sous les ordres du commandant Liaudey, puis du capitaine Gelin et de son cpt. Adjoint Dubille. Tandis que les hommes de troupes logent dans le camp, les sous-officiers et les officiers sont hébergés chez l’habitant, à Foucherans ou à Dole. L’unité du DEGA comprend 3 compagnies composées principalement d’appelés. Au début, le contingent est peu élevé (60 à 80 hommes) mais au fil des mois, chaque compagnie comptera près de 100 hommes chacune, soit au total près de 300 hommes vivant dans le camp au cours de l’année 1945. Les compagnies ont un travail bien défini : entretien des pistes de Tavaux avec transport de gravier, pose des plaques perforées… Pour cela, les appelés sont divisés en groupes de travail. Il y a ceux qui conduisent les engins (caterpillar), ceux qui posent les grilles… |
L’agrandissement du camp par le génie de l’air Mais l’un des travaux effectué par le génie de l’air est de construire dans le camp de nouveaux baraquements en fonction de l’avancée des troupes et des besoins pour accueillir tous les nouveaux arrivants. C’est ainsi que le camp va s’agrandir d’une dizaine de baraquements supplémentaires situés de part et d’autre de la partie allemande.
Une colonie de vacances dans le camp En 1946, le camp militaire de Foucherans accueille une colonie de vacances destinée aux enfants du personnel des bases aériennes de l’est de la France. C’est ainsi que Madame Lorber, dont le père faisait partie du personnel civil de la base aérienne d’Essey-les-Nancy, est venue faire un séjour dans le bois de Chevanny et a profité de la piscine du camp. Elle faisait partie de l’équipe« Maryse Bastié ». |
L’abandon et le démantèlement progressif du camp militaire de Foucherans (de 1946 à nos jours)
Destruction
En septembre 1944, la nouvelle du départ précipité des Allemands s'est répandue rapidement mais les habitants de Foucherans et des villages des environs hésitent à entrer de suite dans le camp de peur qu'il ne soit miné. Ce n’est que quelques heures plus tard que les villageois des environs, comprenant qu’il n’y a plus de danger, arrivent au camp. Puis c’est la ruée, les habitants emportent tout ce qu’ils peuvent avec des charrettes, des brouettes… Après le départ du génie de l’air, le pillage, bien compréhensible, se poursuivra pendant plusieurs années comme l'atteste une lettre de la ville de Puteaux envoyée aux Domaines et datée du 7 février 1949. Elle signale que les habitants "viennent démolir tous les intérieurs des baraquements et ne tarderont pas à s'attaquer aux toitures et qu'en conséquence elle souhaite la remise gratuite des fermes (charpentes) avant que les bâtiments, déjà fortement abîmés, ne disparaissent totalement".
Les destructions vont accompagner le pillage systématique du camp. Plusieurs baraquements sont ainsi peu à peu mis en pièces. Un beau matin, dans les années 50, le mirador en bois situé sur le toit du bâtiment n° 4, complètement pourri, s'écroule de tout son long emporté par une bourrasque de vent.
Bien que l'accès du camp soit interdit, plusieurs affaires de vol défrayent la chronique en mai 1948 et dans la semaine du 25juin 1949.
Pour reboiser le bois de Chevanny, la commune et les Eaux et Forêts décidèrent de faire raser des soubassements en béton avec un buldozer pour faire de la place aux plantations de sapins. Ce sont les soubassements du Génie de l’Air français situés à l’est du camp qui subissent les assauts des engins de démolition.
Les ventes de baraquements
Après le pillage, les destructions, le démantèlement du camp va se poursuivre par les ventes. En 1949, le camp est vendu en partie (le fond) pour 2000 F de l’époque à M. René B., qui obtint l'autorisation de la municipalité de récupérer toute la ferraille et d'extraire tous les tuyaux et les conduites ayant de la valeur pour les revendre. Il fit sauter à la dynamite l’extrémité nord du bâtiment n°4 pour récupérer les fers à béton de 3 cm de diamètre. Mais plus tard la commune dynamita à nouveau cette partie du bâtiment car des morceaux du toit et des murs étaient en position instable et risquaient de s’effondrer à tout instant. M. B. récupéra aussi la cuve en fer de 30 m3 située au-dessus du bâtiment n°4 ainsi que le plongeoir de la piscine. En février 1947, la ville de Puteaux récupère le baraquement n° 14 par décision du service de la Production Industrielle à Paris. Puis en 1949, la même ville dépose en mairie de Foucherans une demande d’achat de deux autres baraquements. En 1947, une adjudication aux enchères verbales et sur soumissions cachetées se déroule le mardi 22 mai à 9 h à la mairie de Dole. La vente concerne des lignes téléphoniques aériennes abandonnées dans la région de Dole, Foucherans et Tavaux. Les renseignements et cahiers des charges doivent être pris à la DR des Domaines, 13 rue des Cordeliers à Lons-le-Saunier et bureau des Domaines, 9 rue Brignard à Dole. |
En 1950, la mairie reçoit plusieurs demandes d’achats de baraquements émanant de M. Henri L., André D. et Louis R. qui souhaitent acquérir les baraquements n° 31 et n° 36, de 5 m par 5 m. Après la vente au plus offrant, c’est M. D. et L. qui obtiennent ces baraquements. La structure métallique de l’énorme hangar n° 29 a été conservée par les Travaux Publics de la Direction des Bases Aériennes. Elle a été transportée et donnée à l’aéro-club de Tavaux par décision ministérielle. Après réparation, le hangar sert toujours aujourd’hui pour abriter les appareils. Depuis septembre 1944, il était entreposé, à la mairie de Foucherans, du mobilier comprenant : 13 chaises, 3 fauteuils, 4 tables, 1 bureau, 4 buffets, 2 chaises et un petit meuble provenant de l’Armée Allemande et laissé en compte par l’administration des Domaines. Après arrangement avec ladite administration, le conseil municipal (séance du 4 février 1947) décide l’acquisition de ce mobilier pour la somme de 7.350 F et de ce fait demande une ouverture de crédit à prélever sur les fonds disponibles de la commune. Le mobilier sera utilisé par la mairie et par les écoles. |
Le camp et le bois de Chevanny,considérés comme un dépotoir :
1967 : dépôt de déblais de terrassement par une entreprise de BTP dans plusieurs soubassements près de la piscine.
1966-1967 : dépôt de coquilles d’escargots parles Ets. Menetrel et Cie.
Avril-mai 1969 : création de la décharge municipale de Foucherans sur l’emplacement de la cantine allemande, dans le fossé.
1984 : comblement de la piscine par un habitant de Foucherans désireux de faire du compost avec de la sciure et autres déchets.
Juillet 2002 : fermeture aux déblais de classe 3. Ouverte le samedi matin aux déchets verts.
2003 : fermeture définitive de la décharge. Réaménagement paysager en prévision.
Les tentatives de réutilisations du camp
Une demande d’achat du camp par la société Solvay de Tavaux parvint à la mairie de Foucherans en mai 1946. Elle demande la cession des principaux bâtiments du camp avec le fond. Ce n’est que le 30 juillet 1948 que la société Solvay renonça à son projet en avançant le fait que les bâtiments étaient trop abîmés. En août 1947 une demande de location du camp est faite en mairie et étudiée en conseil municipal lors de la séance du 30 août 1947. La demande provient d’un entrepreneur en bâtiment installé dans la commune de Revigny dans le Jura. Il souhaite louer le camp militaire sur une superficie d’environ 4 hectares pour y installer une entreprise de maisons préfabriquées en ciment travaillant pour la reconstruction du pays. Le conseil municipal n’y voyant pas d’objection accepte la demande présentée. Mais quelques mois plus tard, cette entreprise dût partir car elle ne disposait pas suffisamment d’eau pour fabriquer son ciment. Un projet de camping dans le camp a été lancé par le Préfet de l’époque qui en avait demandé l’autorisation au maire, M. Bourgeois, parce qu’il y avait une piscine. Mais le conseil municipal s’y est opposé. |
Dans les années 1980, 5 personnes, dont deux routiers et un photographe de Dole, se proposent de faire une boite de nuit située dans le bâtiment n° 4 du camp et un centre équestre avec des poneys dans le reste du camp. La boite de nuit serait décorée avec des cabines de camions et d’autres objets concernant des véhicules. Le fond de la salle serait fermé avec une verrière qui coulisserait en fonction du nombre de personnes présentes dans la soirée. On a même parlé à cette époque d’une association avec « le chanteur Johnny Halliday » mais cette affaire n’a pas abouti à cause del’opposition de plusieurs membres du conseil municipal. Au mois de juin 1998, une étrange demande arrive dans les mains du maire. Il s’agit d’un projet de création d’un espace funéraire pour animaux qui serait installé sur l’emplacement de la décharge dans le bois de Chevanny. Le créateur du projet « Mycènes 7 » Patrick B. prévoit d’y adjoindre une Maison de l’Environnement qui serait située dans les murs du bâtiment n° 4. Mais ce projet n’a pas abouti à cause de l’opposition du conseil municipal. Les seuls à utiliser le camp, de nos jours, sont les chasseurs. L’ACCA de Foucherans occupe l’ancienne « salle des machines » dans laquelle elle a installé sa cabane de chasse avec un ball-trap annuel, des battues et des repas de chasse. |